Bureau de l'ANDP

Comité de Direction : Chrystelle CARDON, Agnès FRANCIS - Trésorerie : Karen BIZIEN et Clémentine PETIT - Autres membres Bureau et Conseil d'Administration : Chantal BAUDUIN, Pierre BOUTTIER, Jean-Philippe COURTIN, Nicolas DAVID, Hélène DUMORTIER, Aude GAUTHIER, Céline GUILLAUMIE, Amandine HEL, Yohanne LAURENT, Vanessa PEYNET, Lydie POIDEVIN, Maud SCHINDELE, Nicolas ROEDIGER, Salem ZELFA

Qu'est-ce que l'ANDP ?

Association Loi 1901, l'ANDP fédère des professionnels MJPM, initialement au sein des associations tutélaires, de tout mode d'exercice depuis la réforme : statuts pluriels, profession unique. Actrice plus de 50 ans à la construction de l'exercice professionnel des mesures de protection juridiques... Lire la suite

 

5 rue Las Cases
75 007 PARIS

contactCA@andp-asso.fr

logo jbu

 

Actualités de l'ANDP

Veille juridique 2e semestre 2018

 

Focus sur cinq arrêts du dernier semestre intéressant les MJPM dans leur pratique.

1. Arrêt du 24 mai 2018 rendu par la 1ère chambre civile de la Cour de cassation (n° 17-18.859) :

N’ont pas qualité pour interjeter appel du jugement de mainlevée les parents de la personne protégée qui ne sont requérants ni à la demande d’ouverture de la mesure de protection ni à l’instance de mainlevée
Une personne est placée en curatelle à la requête du Procureur de la République. Elle obtient la mainlevée de sa mesure de protection. Ses parents font appel et la cour d’appel prononce une curatelle renforcée pour 60 mois.
La personne protégée forme un pourvoi, considérant que l’appel contre la décision de mainlevée n’était pas ouvert à ses parents.

Solution de la Cour de cassation : Il résulte de l’article 1239-2 du code de procédure civile que « l’appel contre le jugement qui refuse d’ouvrir une mesure de protection l’égard d’un majeur n’est ouvert qu’au requérant ; que l’objet de ce texte étant de restreindre le recours contre les décisions favorables à la capacité de la personne, il doit également s’appliquer au jugement de mainlevée d’une mesure de protection […] les parents n’étant requérants ni à la procédure initiale aux fins d’ouverture d’une mesure de protection ni à l’instance en mainlevée de la mesure, ils n’avaient pas qualité pour interjeter appel du jugement de mainlevée ».
La Cour de cassation casse l’arrêt de la cour d’appel au motif que l’appel des parents était irrecevable.


2. Arrêt du 14 mars 2018 rendu par la 1ère chambre civile de la Cour de cassation (n° 17-15.406) :

L’insanité d’esprit, qui doit être caractérisée au moment de l’acte, ne peut se déduire d’un certificat médical circonstancié rédigé quatorze mois auparavant
Un homme est placé en curatelle simple en juin 2008. Part un testament rédigé en mars 2009 il institue un de ses trois enfants légataire de la quotité disponible. Il décède et deux de ses enfants sollicitent l’annulation du testament pour insanité d’esprit.
La Cour d’appel annule le testament au motif qu’ « il a été rédigé plus de quatorze mois après l’examen médical justifiant la curatelle simple et que la capacité de M.X. n’a pu que se dégrader pendant cette période. »
La Cour de cassation casse la décision de la cour d’appel au motif qu’ « en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser l’insanité d’esprit de M.X. au moment de la rédaction du testament, la cour d’appel a privé sa décision de base légale ».


3. Décision du 14 septembre 2018 rendu par le Conseil Constitutionnel (n° 2018-730 QPC) :

L’absence d’obligation d’information du tuteur ou du curateur du placement en garde à vue de la personne protégée est contraire aux droits de la défense

Cette décision fait suite à la question prioritaire de constitutionnalité posée par la Cour de cassation dans un arrêt du 19 juin 2018 (n° 17-15.406).
La question était la suivante : « L’article 706-113 du code de procédure civile, en ce qu’il limite l’obligation faite au procureur de la République ou au juge d’instruction d’aviser le tuteur ou le curateur ainsi que le juge des tutelles à la seule hypothèse de l’engagement de poursuites à l’encontre de la personne protégée, sans étendre cette obligation au placement d’une personne protégée en garde à vue, méconnait-il les droits et libertés constitutionnellement garantis, et plus particulièrement l’article 16 de la DDHC de 1789 ? »

Décision du Conseil Constitutionnel : "En ne prévoyant pas, lorsque les éléments recueillis au cours de la garde à vue d'une personne font apparaître qu'elle fait l'objet d'une mesure de protection juridique, que l'officier de police judiciaire ou l'autorité judiciaire sous le contrôle de laquelle se déroule la garde à vue soit, en principe, tenu d'avertir son curateur ou son tuteur afin de lui permettre d'être assistée dans l'exercice de ses droits, les dispositions contestées méconnaissent les droits de la défense".
En effet dans le cas où la personne « n’a pas demandé à ce que son curateur ou son tuteur soit prévenu, le majeur protégé peut être dans l’incapacité d’exercer ses droits, faute de discernement suffisant ou de possibilité d’exprimer sa volonté en raison de l’altération de ses facultés mentales ou corporelles. Il est alors susceptible d’opérer des choix contraires à ses intérêts, au regard notamment de l’exercice de son droit de s’entretenir avec un avocat et d’être assisté par lui au cours de ses auditions et confrontations".
Il déclare l’article 706-113 du code de procédure pénale contraire à la Constitution et reporte l’abrogation du texte au 1er octobre 2019.

4. Arrêt du 5 septembre 2018 rendu par la chambre criminelle de la Cour de cassation (n° 17-84.402) :

Lorsque la personne poursuivie est privée de la capacité de se défendre en raison de l’altération de ses facultés physiques ou psychiques la juridiction pénale doit surseoir à statuer

Un homme est poursuivi pour agressions sexuelles. Une expertise médicale constate des atteintes irréversibles à ses capacités intellectuelles ne lui permettant pas de comparaître devant une juridiction pénale. Le tribunal correctionnel déclare être dans l’incapacité de décider de sa culpabilité.
Un appel est formé.

La cour d’appel décide de relaxer le prévenu au motif de son impossibilité absolue, définitive et objectivement constatée d’assurer sa défense.
Le Procureur forme un pourvoi en cassation.

La Cour de cassation casse la décision de la cour d’appel au motif qu’« il ne peut être statué sur la culpabilité d’une personne que l’altération de ses facultés physiques ou psychiques met dans l’impossibilité de se défendre personnellement contre l’accusation dont elle fait l’objet, fût-ce en présence de son tuteur et assistée d’un avocat ; qu’en présence de l’acquisition de la prescription de l’action publique ou de disposition légale lui permettant de statuer sur les intérêts civils, la juridiction pénale, qui ne peut interrompre le cours de la justice, est tenus de renvoyer l’affaire à une audience ultérieure et ne peut la juger qu’après avoir constaté que l’accusé ou le prévenu a recouvré la capacité de se défendre.»

Portée : Le trouble psychique ou neuropsychique au moment de la commission de l’infraction est une cause d’irresponsabilité pénale prévue par la loi. En revanche lorsque la personne est atteinte de troubles altérant son discernement au cours de la procédure pénale elle ne peut être jugée, même en présence de son tuteur et assistée d’un avocat. Le tribunal doit surseoir à statuer dans l’attente que la personne soit en état de se défendre.
 
5. Arrêt du 21 novembre 2018 rendu par la 1ère chambre civile de la Cour de cassation (n° 17-22.777) sur les conditions d’ouverture d’une mesure de protection juridique :


Solution de la Cour de cassation : Après avoir rappelé au visa des articles 425 et 440 du code civil que « l’ouverture d’une mesure de protection juridique exige la constatation, par les juges du fond, soit de l’altération des facultés mentales de l’intéressé, soit de l’altération de ses facultés corporelles de nature à empêcher l’expression de sa volonté », la haute juridiction relève que, « pour placer M. R… sous curatelle renforcée, l’arrêt retient qu’il résulte de l’expertise médicale ordonnée avant dire droit que les fonctions cognitives de celui-ci ne sont pas altérées, mais qu’il présente des difficultés d’autonomie physique qu’il minimise. Qu’en se déterminant ainsi, sans préciser si l’altération de ses facultés corporelles empêchait M. R… d’exprimer sa volonté, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ».