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Actualités de l'ANDP

TRIBUNE DEPART D'ANNE CARON DEGLISE

 
     

 

Anne Caron-Déglise quitte le Groupe de Travail Interministériel sur la profession de MJPM!

Anne Caron-Déglise, Avocate générale à la Cour de cassation, présidente de la mission interministérielle sur l’évolution de la protection juridique des personnes (2018), quitte le nouveau groupe de travail interministériel, dénonçant la méthode, l’absence d’échange véritable, respectueux et documenté.

A la veille de la restitution de la première étape des travaux du groupe de mission interministérielle sur la réforme de la profession de mandataire judiciaire à la protection des majeurs, prévue le 9 Juillet, Anne Caron-Déglise, présente en qualité de personne qualifiée, a annoncé sa sortie officielle du groupe co-piloté par la DGCS et la DACS, regrettant “profondément ces choix de méthode qui traduisent une conception de la concertation [qu’elle] ne partage pas.”

Ayant déjà alerté sur une “indispensable cohésion des dispositions relatives à la protection juridique des majeurs entre elles et sur le temps minimum qui devait être laissé aux membres du groupe, très nombreux, afin que celui-ci puisse travailler avec la sérénité indispensable à la construction de propositions argumentées, documentées et réellement débattues “, elle regrette “Ces derniers mois [qui] ont fragilisé l'esprit de confiance mutuelle et de collaboration constructive que l'ensemble des acteurs avaient contribué à créer.”

Prenant acte que “la méthode de travail n’a pas évolué, que la programmation ou la déprogrammation des réunions est réalisée le plus souvent à très bref délai (parfois 24h ou 48h), ce qui empêche de fait une participation large”, que “les auditions demandées de longue date pour contribuer utilement aux débats n’ont pas encore eu lieu alors que les arbitrages ont été annoncés”, que “Les conditions d’un échange véritable, respectueux et documenté permettant de disposer des éléments de réflexion indispensables à la prise de positions constructives et sans a priori, avant tout arbitrage, ne [lui apparaissant] plus réunies [elle] a pris la décision de ne plus prendre part aux travaux de ce groupe. “

Son départ est malheureusement le reflet, une fois encore, des dérives constatées dans ce groupe de travail et maintes fois dénoncées par les représentants des mandataires judiciaires à la protection des majeurs (ANDP*, CNMJPM*, FNMJI*) !

La méthode remet profondément en cause les objectifs qui avaient, jusqu'à maintenant, fait consensus entre tous les acteurs : favoriser effectivement l'expression de la volonté et l'autonomie des personnes protégées grâce à une meilleure reconnaissance des compétences spécifiques des mandataires judiciaires à la protection des majeurs et à un renforcement de leur statut.

La lettre de mission instituant le groupe de travail interministériel de 2018 rappelait “la nécessité de procéder à des réformes afin de délimiter plus clairement les champs de l’action sociale et de la protection judiciaire”, que les institutions de l'Union européenne et des Nations -Unies insistaient sur “la nécessité de prendre en compte la volonté des majeurs”, que ce groupe de travail serait un lieu de réflexion “en vue d’élaborer de nouvelles règles favorisant leur autonomie et l’expression de leur volonté, tout en renforçant le statut et le rôle des MJPM, partenaires privilégiés de la protection juridique des personnes les plus vulnérables”.

La lettre de mission instituant le groupe de travail interministériel de 2020 se situe dans son prolongement en invitant à présenter des « propositions concrètes, dans un délai de 12 Mois, tendant à faire évoluer le statut professionnel des MJPM ». Elle rappelle d'une part l’importance des différents travaux menés entre 2017 et 2020 (la mission interministérielle pluridisciplinaire sur l’évolution de la protection juridique des majeurs pilotée par Anne Caron-Déglise, les travaux engagés par la DGCS / DACS sur les outils pédagogiques à destination des tuteurs familiaux et ceux sur l’éthique commune aux MJPM, l’étude de coût des mesures de protection confiée à l’IGAS). Elle souligne d'autre part que ces travaux permettent aujourd’hui « d’envisager une réforme de la règlementation applicable aux MJPM pour faire évoluer et reconnaître leurs compétences et leurs responsabilités accrues ainsi que leur rôle essentiel dans la mise en œuvre des mesures de protection ».

Madame la Ministre de l'Autonomie elle-même, dans deux discours d’ouverture de colloques sur la protection juridique des majeurs tenus en 2021, affirme « la nécessité d'une réforme plus ambitieuse » du fait de la charge de travail et la complexité des missions du mandataire, avec des interventions “dans des champs souvent très techniques : juridiques, financier, social ».

Elle ajoute :

« Derrière votre profession, ce qui est en jeu évidemment, c'est avant tout la protection des personnes avec comme ambition : bien sûr de leur permettre de conserver la plus grande autonomie possible, mais aussi de respecter leur choix de vie tout en leur procurant une aide adaptée et proportionnée à leurs difficultés. Ces ambitions sont redoutablement exigeantes elles nécessitent que les mandataires judiciaires disposent d'un cadre professionnel qui leur permette d’exercer leurs missions dans les meilleures conditions possibles ».

« Notre boussole commune doit être le respect de l'autonomie des personnes protégées, parce que quelle que soit leur situation, elles ont le droit d'exprimer leur volonté et d'être écoutées ». 

« Le sujet des droits et libertés des personnes est un sujet sur lequel on ne peut transiger ».

Nous partageons cette ambition pour la protection des majeurs et ne pouvons que constater que la méthode choisie dans le GTI n'y répond pas, faute d'avoir respecté un espace aux différents points de vue.

Aujourd'hui, sous couvert d'un consensus et de concertations qui n’ont pas eu lieu, les propositions d'ores et déjà présentées comme arbitrées vont conduire à :

  • Une régression des niveaux de qualification des MJPM, des compétences attendues et donc de la qualité du suivi et de la gestion des mesures de protection juridique (arbitrage en faveur d’une licence professionnelle alors que 95% des MJPM ont déjà au minimum un diplôme initial Bac+3);
  • Un accroissement supplémentaire des responsabilités des MJPM, déjà étendues par les effets induits par la déjudiciarisation engagée par la loi du 23/03/2019 ;
  • Le maintien d'une grande confusion entre les champs de l’action sociale et de la protection judiciaire, qui entretient une conception de la personne protégée préjudiciable à un respect effectif de ses droits et de sa personne.

On pourra nous reprocher notre ardeur...mais elle est à la hauteur de notre indignation, de notre résistance à cette vision paternaliste de la protection juridique des majeurs que nous ne cautionnons pas, de notre refus pour les éléments de langage, à l’endroit-même où des discussions collectives, concertées et techniques devraient avoir lieu avec des experts, devraient considérer la qualité des travaux passés émanant d’une véritable concertation et les utiliser, devraient accepter d’entendre l’alerte que nous, représentants des MJPM, lançons déjà depuis plusieurs mois.

Il nous importe et nous importera toujours de rechercher l’efficacité et l’effectivité des droits des personnes protégées et de ne pas tomber dans la facilité de l’affichage et des effets d’annonce.

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